PASCAL BRUCKNER : PHILOSOPHE ?



Je viens de finir son livre « Le sacre des pantoufles » acheté sur la fnac en version epub pour liseuse.

Non je ne suis pas allé en centre ville de Toulouse à plus de 20 kilomètres de chez moi, dans les embouteillages, le stress, les dépenses inutiles et la pollution de mon moteur thermique pour acheter ce supposé chef-d’œuvre. Comment ai-je pu me comporter en pantouflard du XXI eme siècle à ce point ? Le numérique c’est quand même la fin du rapport au réel, et je me suis privé d’un bon rapport au réel voire d’une rencontre concrète avec une femme consentante qui aurait voulu attraper le même livre que moi au rayon philosophie. Qui sait ? Certainement pas le virtuel…

Bref j’ai lu son livre à charge, prônant une vie plus concrète et plus liante, convoquant la vie à tous les étages, l’action… pendant que d’autres réfléchissent et écrivent des râleries réactionnaires de plus de 200 pages pour les vendre également en version numérique sur des sites comme la fnac…

Je me suis senti coupable d’aimer mon ordi, ma seule fenêtre sur le monde. Il est vrai que l’essence gratuite ne pleut pas, ni les billets, et que mon monde s’est considérablement rétrécit avec la maladie psychique et les revenus qui vont avec.

D’autant qu’au lieu de m’affairer tous les jours à développer des sites web ou à créer des musiques sur mon cubase chéri et donc sur mon ordinateur, je pourrais… je pourrais… euh… c’est quoi la page des solutions… Ah... on est pas dans le développement personnel : pas de solution même hasardeuse. Ce n’est pas du Rika Zaraï. Ce n’est pas de la « tisane pour les yeux » expression extraite dudit livre de Pascal Bruckner.

Heureusement que j’ai un cercle d’amis de longue date parce qu’avec la grossophobie ambiante et ma situation géographique, il y aurait peu de chance que je rencontre de nouvelles personnes avenantes. Mais qu’à cela ne tienne, je ne suis pas très avenant non plus. Ce doit être ma maladie psychique et psychiatrique qui laisse certaines interprétations me pourrir la vie. Je lutte contre et les identifient, les rejette, afin de donner le meilleur change. J’essaie quand j’y pense d’être souriant, poli (je n’ai guère à me forcer), et tout simplement branché avec la réalité du moment.

Mais revenons-en à notre mouton… perdu dans les hauteurs des massifs philosophiques. Il a raison. Où vont tous ces gens qui cherchent la paix et le confort, sinon chez eux ? Dehors, je vais avoir si froid, mais ça doit être à cause de moi… Sur la route les gens conduisent sans assurance, sans permis, sans considération pour autrui. Il faut subir les opinions burlesques des idiots grégaires, les moutons dont je parlais tout à l’heure qui eux aussi vous traitent de mouton à tout bout de champ pour autant que vous n’ayez pas la même opinion qu’eux. Bref il faut avoir peur de tout et surtout de sortir, pour faire quoi ? Les courses, bosser. Tout est si passionnant dehors pour les gens qui aiment sortir. Alors qu’à la maison, à lire du Bruckner… ou bien à composer ou à programmer, à me cultiver, à profiter de la paix qui existe au foyer…. On va devenir des putain de légumes. Ce sera la première culture bio française ! Pendant que l’inflation matraque, les guerres n’en finissent de s’annoncer, la misère règne sur les pauvres…

Pourquoi n’y ai-je pas pensé avant ? La vraie vie est ailleurs que dans mon appartement. Je devrais sortir marcher, être en pleine santé, rencontrer plus d’alcooliques, de chauffard lors d’un accident que nous aurions eu non par défaut de politesse mais par amour de la concrétude. La vie concrète est si attractive avec ses guerres, sa violence financière. Pourquoi ne suis-je pas le guerrier du moyen-âge ? Je suis devenu mou comme ces hommes dans wall-e ou devrais-je dire « wall-lit », allongé que je suis. A l’époque de Rimbaud et à toutes les époques il y avait les assis… aujourd’hui il y a les couchés chanson bien connue du groupe « faim de rêve ».

Couché comme un chien. Docile. Plutôt que sur les barricades, les yeux rivés sur la tisane : la télévision, à regarder des chaînes faisant l’apologie quotidienne du manque de sécurité. Alors qu’il y a tant de chaînes de télévision qui tirent vers le haut, le savoir, la culture, tel que ARTE et ...euh ben… euh…

Il faut se lever bordel ! Il faut se lever même si c’est pour danette ! Qu’importe la raison, il ne faut plus laisser aller le monde sous prétexte que le vote ne sert à rien. Il faut se lever sortir et vivre, essayer, divorcer, souffrir, avoir peur, réussir, avoir des joies collectives, rencontrer ses voisins, parler et rire avec eux. Il faut se lever ! Certes c’est la vie ! Pourquoi être philosophe quand on peut être le Indiana Jones du quotidien sur une chaîne de montage, au café ou ailleurs. Pourquoi ne pas profiter de toute cette belle humanité, qui parfois je l’avoue vous redonne foi en l’humanité entière. Il est temps à nouveau de reprendre le souffle à nouveau et nous jeter à l’eau pour ceux qui savent nager et le font déjà. Pour le reste, ceux qui prennent les coups en permanence, les punching ball de l’humanité, le repli chez vous, car il n’y en a pas d’autre, je vous l’accorde !

Quant au livre de Pascal Bruckner… ? Il ne faut pas lire que ce que avec quoi on est foncièrement d’accord non plus. Donc c’était intéressant d’affiner ma vision du légume que je suis, l’hyperconnecté au grand vide. Et « quand je remettrai mon ardoise au néant un de ces prochains jours, il ne me ricanera pas à la gueule. Mes chiffres ne sont pas faux, ils font un zéro pur…. » André Frénaud (épitaphe, les rois mages, Gallimard)