La machine a espoir



Beaucoup d’espoir de sortir de lot, de sortir de l’eau, de se distinguer individuellement. La plupart d’entre nous se noient. Musiciens, compositeurs, avec une production qui tient la route 66 ou même 55 et demie.

Lorsqu’on voit le nombre d’artistes sur Bandcamp, le nombre d’albums qui sortent à la seconde rien que sur cette plateforme, ça donne le vertige de la musique. Le pire, c’est que lorsque j’écoute mon ami du Zimbabwe qui fait de l’électro lyrique avec des instruments locaux et dont la pochette improbable devient le marqueur d’une vraie probable rencontre, je me dis « punaise, ça calme ».

Oui tu rencontres des choses du troisième type. Et comme je le disais précédemment, alors que le mainstream change de chanson tous les 10 ans, tu peux rencontrer quelque chose qui vient de loin et même à proximité géographique.

Heureusement nous ne sommes à peu près un milliard d’humain à la louche à produire de la musique. La probabilité de toucher le gros lotlot est plus improbable que ceux de … j’ai plus son nom en tête… bref…

L’espoir fait vivre… Et croyez-moi : on vit lol… Ceux qui cherchent autre chose que la possibilité de faire de la musique se lassent et se lancent en plomberie. Les plus malins ou cyniques offrent la possibilité aux mendiants musicaux de payer leur emplacement dans la rue, la où il y a de la visibilité.

Si on ne se détache pas un peu du caractère aléatoire de croiser Jésus dans le métro, et pas sa pale copie, on éprouve une frustration de taré. « Comment est-ce possible qu’on ne m’ait pas remarqué au milieu du milliard d’humains musiciens ». Cherchez Charlie mais en pire.

Le désespoir ne doit pas vous saisir. Vous faites de la musique. Vous aimez en faire. Certes personne ne vous écoute. Mais, à votre mort, vos comptes feront zéro comme je dis toujours. On ne pourra pas vous reprocher d’avoir gâcher votre vie à faire des choses utiles… dont tant de gens se targuent à longueur de temps. Comme si être utile n’était pas aussi absurde et inutile que de produire du vent.

Je vois la musique, ma musique, comme une manière d’arracher au néant ( pour reprendre le vocabulaire de Zhao Wuji, le peintre ), un peu de ce mystérieux moi qui vient d’une autre planète. A chaque morceau, je me dis « et dire que j’avais ça dans le corps »… Je rencontre le puits incommensurable et peut-être infini de la production musicale. Je me regarde dans un miroir, mais « Je » est un autre. C’est une sensation étrange et jubilatoire que la création musicale, la création en général qui vaut toute l’oseille et la célébrité du monde, à quelque hypocrisie près… lol

N’empêche que « tu peux pas comprendre » à quel point c’est une joie que de produire de la musique. S’il n’y avait pas ce putain de corps à traîner – comme le souligne Cioran – nous serions bien plus immatériels… lol, et la musique pourrait couler à flot.

Alors de grâce, ne tombez pas dans le piège de la mendicité. Produisez libre et un peu seul. Et si au détour d’une rencontre, d’un contact vous avez la possibilité de rencontrer les oreilles de la planète, alors envoyez moi le numéro de téléphone. C’est pas pour moi : c’est pour un ami… lol. Je déconne : foncez. Mais n’oubliez pas que le plaisir de faire et ce contre tous vents, reste votre plus pur trésor. Et si besoin, cultivez les illusions qui vont avec, en prenant soin d’éviter le desespoir...