LA FEMME ET LE VOILE



Il n’y a pas de liberté. Nous sommes tous déterminés au sens philosophique, c’est-à-dire conditionnés. D’un côté comme de l’autre j’ai envie de dire. La femme qui porte le voile est conditionnée par sa culture, son éducation, même si elle prétend le contraire. De l’autre côté, si tant est qu’il y ait un « autre côté », pourquoi en serait-il différemment ?

Le poids de la culture, de la tradition, de l’habitude, des symboles, des autres, pèsent toujours, en tous lieux, pour tout le monde. Il n’y a pas « des esprits libres » d’un côté et de l’autre des « moutons ».

S’il existe un choix, il ne peut se faire que dans le paradoxe, dans l’opposition, contre la voix du peuple, dans la différence, et ce, même s’il y a évidemment des oppositions conditionnées et caricaturales.

Il y a à mon sens une voie, un exutoire, une possibilité d’échapper, de s’évader, tout en restant physiquement dans ce monde. Nous verrons cela dans d’autres articles...

L’opposition est la position la moins subtile, la moins créative, puisqu’elle consiste à prendre le contre-pied. L’opposition reste une proposition souvent caricaturale. Elle est la réponse négative à un mouvement, le renversement symétrique d’une pensée….

L’homme qui revendique la laïcité comme principe l’est également, conditionné. Il n’y a pas un homme libre face à une femme de confession musulmane dans le débat télévisuel qui oppose aujourd’hui Manuel Valls à son interlocutrice.

Pour moi, cependant, toute religion est un archaïsme puisqu’elle se fonde sur la préservation de « valeurs » ancestrales par la répétition, et le rituel.

La répétition d’idées sans examen préalable, et parfois même la répétition d’idées affublées de leur lot d’arguments dans un package qu’on nommera « je répète » ne vaut pas mieux qu’une religion. La pensée clef-en-main existe, en politique, comme ailleurs, où les gourous esclavagistes, cupides et malsains, savent nous injecter ce qu’il faut penser. C’est ainsi qu’on voit des peuples entier penser avec conviction que le bonheur est dans la possession, la consommation, les richesses, le pouvoir ou l’esthétique.

La religion du travail, par exemple, me paraît faire parti de ces exemples où l’on défend une valeur sans avoir considéré l’idée même, dans son contexte actuel. Nos parents et grand-parents ont voulu nous transmettre le goût de l’effort. Ils nous ont répété de « bien travailler » à l’école lorsque nous étions enfants. Pour certains, cette loyauté envers leurs parents et leur éducation vaut pour une pensée et demeure sans bornes, un peu comme la connerie. Or la pensée, c’est justement la remise en perspective, l’adaptation, d’une idée héritée ou pas, d’une conception de départ. Sans ce travail, il n’y a pas d’adaptation possible aux contextes nouveaux, et donc aucune intelligence. Mais au-delà encore, j’irais même jusqu’à dire qu’il n’y a pas de vie sans refonte des idées. La vie est tout à fait le contraire de l’inertie, de la simple répétition aveugle. C’est ainsi que gagner des clopinettes, souffrir, participer activement au capitalisme, au consumérisme, à la surenchère d’actions pour créer des richesses toujours plus gourmandes et brandir l’étendard du travail, en espérant la médaille, me paraît idiot.

Les gens n’ont pas des idées très profondes. L’argumentation est souvent maigre et convenue. Cela suffit pour survivre, afficher un semblant de vie. Cela suffit pour faire illusion, faire acte de présence. On peut tourner toute une vie sur quelques illusions, qui je l’avoue sont nécessaires. On peut vivre une vie sans savoir qui on est, sans avoir eu une seule idée originale et personnelle. Il est même probable que les banalités protègent de l’exclusion, facilite l’intégration, booste le sentiment d’appartenance. L’homme qui se croyait libre et la femme voilée se marièrent et eurent beaucoup d’enfants conditionnés…