Anarchiste...



C’est drôle. On m’a souvent dit au passage «  toi t’es un philosophe… un anarchiste ». Je ne suis ni philosophe, ni anarchiste. Tout être pensant n’est pas nécessairement philosophe ou anarchiste. Tout être pensant, qui n’emprunte pas à une pensée clé-en-main, n’est pas nécessairement antisocial. Tout être pensant n’est pas nécessairement contre l’ordre… Cet ordre ne serait pas établi par des règles imposées par le plus grand nombre (non abstentionnistes) de votants mais par l’intelligence individuelle et collective. Sans cesse, il s’agirait de s’adapter à la nature et aux défis qui nous attendent et ce sans l’ombre d’un conservatisme qui empêcherait ladite intelligence. L’intelligence est la capacité d’adaptation non pas la capacité à faire comme hier. Mais bon… personne n’est prêt à tout perdre pour s’adapter. Nous sommes dans le confort de la propriété et ce que nous construisons, nous le tenons pour acquis. Aujourd’hui pourtant il est plus sage de vivre comme un sans domicile fixe, un locataire, un migrant, quelqu’un de mobile et de souple, prêt à tout abandonner. Cela n’empêcherait en rien de construire des choses, d’avoir des projets et des vies heureuses, désintoxiquées de l’illusion de la possession. Je ne pense pas comme proudhon que la propriété soit le vol mais je pense qu’il faut revoir nos prétentions nettement à la baisse et être un peu raisonnable collectivement et individuellement. Je pense même qu’être modérément pauvre est une vertu. Pour autant, on s’en passerait bien. Je le comprends. Personne n’a envie d’être pauvre car dans nos sociétés cela signifie être esclave de quelque chose. Pour autant celui qui possède a tout à perdre. Et celui qui ne possède rien n’a rien à perdre. Voyager léger permet d’être adaptatif. Les environnements changent trop vite de nos jours et nous n’avons pas la stabilité d’antan.

Je ne suis pas anarchiste. Je suis le premier à respecter les autres et à me satisfaire qu’il existe des règles de vie en société auxquelles je souscris. Par contre, je trouve ce pack de pensées réducteur, et il n’invite pas à la créativité et à la remise en question. On est, en tant que citoyen, trop souvent dans le choix du sauveur, et peu souvent dans le rôle du créateur de sens. Je dis cela mais je n’oublie pas tous ces gens qui s’investissent très clairement dans les combats sociaux, politiques, les gens qui participent au bien-être de la population comme le monde médical, etc. etc. J’ai moi-même participé ou créé des associations à but non lucratif dont l’objet était tourné vers les autres. J’y ai consacré, toutes actions confondues 10 ans de ma vie. Et je peux dire que dans notre contexte libéral, rien n’est plus ingrat que de proposer. J’étais à chaque fois bénévole. J’utilisais ma voiture, mon essence, mon temps, mon énergie. Ce monde-là m’a remercié d’un coup de pied au cul et au moral. Le système politique actuel est très incompatible avec le don de soi. Les politiques veulent que l’association ait beaucoup d’adhérents, soit visible, ou riche. Bref qu’elle valorise leurs subventions. Bref, c’est très difficile de proposer un espace ou la monnaie d’échange ne soit pas seulement le fric direct, ou indirect. Ce qui me pousse à penser qu’un univers où tout est monnayable est invivable à mes yeux. C’est pourquoi entre autres, que je ne suis pas partisan du libéralisme sauvage et que je pense qu’aujourd’hui plus que jamais nous avons besoin des peuples pour s’opposer, ou du moins réguler ce qui s’apparente à la loi du plus fort (économique). Je crois donc encore à l’intelligence et la force du nombre. En cela, je reste démocrate.

Je ne vous ferai pas l’affront de m’égosiller sur le fait que je ne suis pas philosophe… Les philosophes, leur ego et leur science, les neuneus, leur mépris et violence, savent en chœur que je ne le suis pas.

Pour autant, je suis plein d’opinions paradoxales… il y a un début d’éveil. Le chemin que je me suis choisi est de ne pas me mentir à moi-même… en tous cas le moins possible. Je suis désormais moi-même et – j’aime bien la formule – je le fais exprès. C’est le plus bienfaisant des chemins. Car l’âpreté est vite remplacée par la parfaite connaissance de soi. Et en ce qui me concerne, j’ai des exigences modérées envers moi-même. Je suis légèrement en deçà de la l’esprit de performance, et d’exigence de résultat qui règne sur la planète. Produire n’est pas mon objectif. Mon objectif est d’être en connexion avec le rythme de la planète, celui de la biologie de mon corps. Mon objectif est de produire du vent. Des choses qui ne laissent pas trop de traces de carbones ou chimiques. Cela n’empêche pas de vivre. « Mes comptes feront zéro ».